Bielorussie et Internet : 1984 is back !

Depuis plusieurs années maintenant, le régime autoritaire du président biélorusse Alexandre Loukachenko ne cesse de resserrer son emprise sur la société, et particulièrement sur l’accès à l’information. Si Internet a longtemps été un espace de liberté pour les Biélorusses, les choses ont radicalement changé ces derniers temps, avec des restrictions de plus en plus sévères et une surveillance accrue. Retour sur une situation qui préfigure peut-être un retour à l’obscurantisme.

Des lois liberticides

Depuis la fin des années 2000, le gouvernement biélorusse a adopté une série de lois visant à limiter la liberté d’expression en ligne. Parmi celles-ci, on peut citer la loi sur la « protection des enfants contre les informations nuisibles », qui permet de bloquer les sites jugés « immoraux » ou « obscènes », sans aucune définition précise de ces termes. Cette loi a notamment servi à bloquer des sites critiques envers le régime, ainsi que des sites indépendants.

En 2018, une nouvelle loi est venue renforcer encore ces mesures, en obligeant les fournisseurs d’accès à filtrer l’accès à certains sites, sous peine de sanctions financières ou pénales. Cette loi a également imposé l’enregistrement obligatoire des blogs et des réseaux sociaux auprès des autorités, ce qui a eu pour effet de freiner la liberté d’expression en ligne.

Enfin, en 2021, une nouvelle loi est venue bannir les journaux étrangers de la distribution en Biélorussie, que ce soit en version papier ou en version numérique. Cette mesure a été justifiée par le gouvernement comme une réponse à des « menaces » extérieures, mais elle a surtout pour effet de limiter encore l’accès à une information indépendante et critique.

Une surveillance accrue

En plus de ces mesures législatives, le gouvernement biélorusse utilise également des moyens techniques pour surveiller ses citoyens et contrôler l’information qui circule sur Internet. Ainsi, il a été révélé en 2019 que le pays avait acheté des technologies de surveillance sophistiquées à une entreprise israélienne, NSO Group, qui permettent notamment d’espionner les conversations WhatsApp ou Telegram.

Par ailleurs, le gouvernement a créé en 2020 un centre de surveillance de l’information sur Internet, dont la mission est de surveiller les réseaux sociaux, les blogs et les médias en ligne pour détecter toute forme de « menace » envers le régime. Ce centre a notamment été impliqué dans la traque des opposants politiques et des journalistes indépendants.

Enfin, le gouvernement biélorusse a bloqué en janvier 2021 l’accès à Tor, un réseau de communication anonyme très utilisé par les militants et les journalistes, au prétexte qu’il était utilisé par des « extrémistes ». Cette décision a été condamnée par de nombreuses organisations de défense de la liberté d’expression, qui y voient une menace grave pour les libertés fondamentales en ligne.

Des conséquences dramatiques pour les Biélorusses

Ces mesures liberticides ont des conséquences dramatiques pour les Biélorusses, qui voient leur accès à l’information et leur liberté d’expression de plus en plus limités. Les journalistes indépendants sont régulièrement arrêtés, harcelés ou intimidés, tandis que les opposants politiques sont traqués sur Internet, où ils risquent d’être dénoncés aux autorités par des trolls pro-gouvernementaux.

De plus, cette situation a des conséquences économiques, car elle décourage les entreprises étrangères de s’installer en Biélorussie, dans un contexte déjà difficile marqué par les sanctions internationales et la crise économique. De nombreux start-ups et entrepreneurs quittent ainsi le pays pour trouver des espaces plus favorables à leur activité.

Enfin, cette situation a des conséquences psychologiques, car elle crée un climat de peur et de suspicion généralisé, où chacun surveille l’autre et où la parole se libère de moins en moins. Les Biélorusses ont déjà connu 70 ans de régime soviétique et 30 ans de dictature post-soviétique ; il est triste de constater qu’ils doivent encore vivre sous un régime qui ne respecte pas leurs droits les plus fondamentaux.

Quelles solutions pour la liberté d’expression en Biélorussie ?

Face à cette situation inquiétante, les organisations de défense des droits humains et de la liberté d’expression ont appelé à une mobilisation internationale pour dénoncer les violations des libertés fondamentales en Biélorussie et pour soutenir les journalistes et les blogueurs indépendants. Les sanctions économiques et diplomatiques sont également une arme à disposition de la communauté internationale pour faire pression sur le gouvernement et l’obliger à respecter les droits humains.

Cependant, il est important de souligner que la solution ne viendra pas seulement de l’extérieur. Les Biélorusses doivent eux-mêmes se mobiliser pour défendre leurs droits et leur liberté, en dépit des risques et des obstacles. La solidarité entre les différentes forces démocratiques et la création de réseaux d’entraide peuvent contribuer à renforcer l’espoir et à faire reculer la peur.

Enfin, il est crucial de rappeler que la liberté d’expression n’est pas un luxe, mais un droit inaliénable de chaque être humain, quelle que soit sa nationalité ou son pays de résidence. En Biélorussie comme ailleurs, il est urgent de résister à la tentation du totalitarisme et de défendre la démocratie et les droits humains pour tous.

La Biélorussie est aujourd’hui un pays où la liberté d’expression est gravement menacée, où les journalistes et les blogueurs sont persécutés, et où la surveillance en ligne est de plus en plus oppressive. Cette situation ne peut être tolérée par la communauté internationale, qui doit se mobiliser pour soutenir les forces démocratiques et condamner les atteintes aux droits humains. Mais c’est également aux Biélorusses eux-mêmes de se lever pour défendre leur liberté et leur dignité, en dépit des risques et des obstacles. Car il est clair que la situation actuelle ne peut pas durer, et qu’un jour ou l’autre, la vérité finira par triompher.